Sénatoriales 2023. Seulement 02 handicapés sur les 654 grands électeurs de l’Adamaoua

Sénatoriales 2023. Seulement 02 handicapés sur les 654 grands électeurs de l’Adamaoua

Le constat de leur marginalisation n’est plus une supposition, c’est désormais un fait

Si les élections sénatoriales du 12 mars dernier se sont déroulées dans une accalmie totale sur l’ensemble de la région de l’Adamaoua, il n’en demeure pas moins qu’il y a eu des frustrations. Pour ce grand rendez-vous de l’histoire, la région « château d’eau » du Cameroun avait sur le fichier électoral 654 électeurs. Malheureusement, cette élection a démontré aux yeux de tous, la marginalisation et la stigmatisation que vivent les personnes handicapées au sein de la société en général, et singulièrement dans les formations politiques à travers le choix de leurs conseillers municipaux.

En effet, pour ces élections sénatoriales du 12 mars dernier, 11.138 camerounais grands électeurs étaient attendus aux urnes parmi lesquels 34 handicapés sur l’ensemble du triangle national. Ainsi, la région de l’Adamaoua avait alors 654 grands électeurs donc 02 handicapés. Ces deux conseillers municipaux sont tous les deux du département du Faro et Déo. « La faible participation des personnes handicapées au vote des sénateurs témoigne à suffisance à quel point ces personnes vulnérables sont mises à l’écart de la gestion des affaires publiques au Cameroun », indique Joseph Tene, responsable d’une organisation qui fait la promotion des droits des personnes vivant avec un handicap. S’il est vrai que les principaux acteurs ne sont pas très motivés à se lancer véritablement dans la politique, c’est pour des raisons propres aux handicapés.

« Je suis une militante du Rdpc et c’est le seul parti politique que je connaisse. C’est vrai que les handicapés ne sont pas trop actifs en politique, et, cela c’est pour deux raisons. La première c’est qu’au Cameroun, il faut avoir de l’argent pour être aux premiers rangs en politique. Dans le cas contraire vous serez là seulement pour applaudir. Si cela est valable pour les personnes valides à plus forte raison pour nous, les handicapés. La seconde raison c’est que les responsables des partis politiques ne viennent pas vers nous tout simplement parce que nous ne représentons rien à leurs yeux », fulmine Dada Haminatou, présidente de l’association des femmes handicapées de la région de l’Adamaoua. Si l’on prend également en compte le principe d’application de la discipline interne des partis politiques dans lesquels c’est l’organe central basé à Yaoundé qui donne et oriente la conduite à tenir sur le terrain, les personnes handicapées ont encore du chemin à faire, peu importe la chapelle politique. 

Les textes non respectés

Dans son article 25b, le pacte international relatif aux droits civils et politiques souligne que, tout citoyen a le droit et la possibilité sans aucune des discriminations visées à l’article 2 et sans restriction déraisonnable, « De voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal au scrutin secret, assurant l’expression libre de la volonté des électeurs ». Dans le même ordre d’idée, l’article 21b du protocole à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relatifs aux droits des personnes handicapées en Afrique, stipule que, « les Etats parties mettent en place toutes les politiques et prennent les mesures pour encourager la pleine participation des personnes handicapées aux processus démocratiques et de développement, y compris en s’assurant de la disponibilité du matériel d’éducation civique dans des formats accessibles ; en veillant à ce que les personnes handicapées, y compris celles ayant des incapacités psychosociales ou intellectuelles, puissent participer effectivement à la vie politique et publique, notamment en tant que membres de partis politiques, électeurs et titulaires de fonctions politiques et publiques ».

Rappel

Selon les chiffres avancés par le Fonds des Nations Unies concernant les personnes vivant avec un handicap au Cameroun, elles représentent 15% de la population camerounaise. Aussi, en s’appuyant sur les chiffres du dernier recensement mené au Cameroun, le ministère des affaires sociales estime à près de trois millions la population des personnes handicapées. 

Par Francis Eboa (Jade)