PEUPLES AUTOCHTONES. LE CALVAIRE DES BAGYELLY POUR ACCEDER AUX BESOINS DE BASE

PEUPLES AUTOCHTONES. LE CALVAIRE DES BAGYELLY POUR ACCEDER AUX BESOINS DE BASE

L’accès à l’eau potable et à la terre dans les campements pygmées – Bagyelly du département de l’océan demeure une véritable préoccupation à cette 39e Journée Internationale des peuples autochtones, malgré les lois internationales ratifiées par le Cameroun.

Dans le campement Kilombo, arrondissement de Lokoundje, c’est dans la rivière qui se jette dans le fleuve Kienke que les Bagyelly s’abreuvent ; c’est dans le même endroit de cette rivière qu’ils se lavent et font leur lessive. Une borne fontaine avait été placée dans le campement jadis par la société Socapalm Kienke, mais les bagyelly se plaignent de ce que cette eau leur donne le mal de ventre et accusent le manque d’entretien. « Nous avons régulièrement la diarrhée en consommant de cette eau ». Révèle le notable du campement, Yengue Jean. Dans les campements de Lolabe à Kribi 1er, c’est le même calvaire.

Il faut parcourir de longues distances en brousse pour recueillir de l’eau (douteuse) des sources. A Bidjocka, dans l’arrondissement de Bipindi, des pygmées Bagyelly étaient comptés parmi les morts de cholera en début de cette année 2023 dans cette unité administrative. Malgré la survenance de cette épidémie de choléra, aucune disposition n’a été prise par les pouvoirs publics à l’effet de faciliter l’accès de ces peuples autochtones à l’eau potable. Au regard des différentes pathologies liées à l’eau qui font pression sur la société en général aujourd’hui, le manque d’eau potable chez ces peuples autochtones suscite de véritables inquiétudes.

Pourtant, l’Etat du Cameroun a ratifié plusieurs lois internationales relatives à ce droit des peuples autochtones. En effet, dans l’esprit des nations unies, le droit à l’eau des peuples autochtones n’est pas limité à l’accès à une eau potable et salubre, mais il est aussi étroitement lié a une série de droits, y compris l’autodétermination, la survie, la santé, la terre et les ressources naturelles, ainsi que les pratiques spirituelles et culturelles. Les articles 21 ; 25, respectivement de la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones et la Déclaration universelle des droits de l’homme sont forts édifiants à ce sujet. Il existe en réalité un lien fondamental entre l’accès à l’eau et une vie de dignité. 

Concernant l’accès à la terre, c’est la plus grande désolation. Si ce ne sont pas les agro-industries, ce sont les bantous qui expulsent les bagyelly hors des possessions foncières de leurs ancêtres. Dans le campement de Kilombo, c’est Socapalm et Hevecam qui se partagent les terres mettant les peuples autochtones à l’étroit. « Nous sommes réduits à gratter les marécages, Socapalm et Hevecam ont tout arrache ». Peut-on entendre des lamentations de dame Louanga, notable de ce campement.

A Bidou, toujours dans la Lokoundje ou dans les campements de l’arrondissement de Bipindi, les lamentations des Bagyelly sur la question du foncière sont malheureusement dans le registre des banalités. Le fait est motivé par la vente et des appétits voraces des terres dans le département de l’océan du fait de la révolution industrielle de la ville balnéaire de Kribi. Tout ceci en marge de l’article 26 de la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones qui stipule que «Les peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils ont utilisés ou acquis ».

Joseph Abena Abena