Péril sur les libertés publiques. La  légalisation des associations mise à rude épreuve à Batcham

Péril sur les libertés publiques. La légalisation des associations mise à rude épreuve à Batcham

A la fin du mois d’octobre dernier, François Etapa, préfet du département des Mbamboutos, a adressé une correspondance au sous-préfet de l’arrondissement de Batcham, Ignatius Ekale Netonda, lui enjoignant d’interrompre les procédures de légalisation des associations émanant des comités ou sous comités développement des quartiers ou villages de Batcham. Tollé chez les militants de la région.

L’autorité administrative départementale estime qu’il  y a trop de  procédures de légalisation des associations et souhaite une centralisation.Conseiller municipal à Batcham, Justin Ymeli Talla, pense qu’il est important de travailler pour le développement autocentré. Mais il approuve la démarche du préfet du développement des Bamboutos. «  Je salue le dynamisme de nos frères de Bambi. Mais je ne pense pas que tout doit être coordonné au niveau du comité de développement. Le village est composé de 12 sous-secteurs. Les gens ne doivent pas s’isoler et légaliser des sous-comités alors qu’il existe un grand comité », soutient-il. Autrement dit : inutile d’éparpiller les procédures, rassemblons les toutes à Batcham.

Robert Ngoufo, président du sous-comité de développement du village Bambi dans le groupement Batcham, plaide au contraire pour la pluralité des associations légalisées en matière de développement communautaire. Il pense qu’en matière de développement communautaire, les choses devraient se passer comme dans un régime fédéraliste. « Nous avons été victimes d’escroquerie liée à l’hypercentralisation du comité de développement à Batcham. Une année, nous avons mobilisé plus de 40 millions de Fcfa pour la construction d’un foyer communautaire au village. Personne ne nous a jamais rendu compte de sa gestion. Jusqu’à  présent cet ouvrage est inachevé. Nous plaidons pour la liberté d’association. Nous pensons que les gens doivent d’abord cotiser dans le comité ou le sous-comité de développement de leur village avant de contribuer pour l’ensemble du groupement. Nous contribuons, au niveau de Bambi pour la construction des routes, des écoles et des ponts. En ce qui concerne le groupement Batcham, nous mettons la main à la pâte lorsqu’il faut de l’argent pour des grands travaux communautaires », explique-t-il.

Il est loin de rester au niveau des paroles. Car  le nouveau bureau du Sous Comité d’Action de Développement du Secteur Bambi (SCADESEBAM) a officiellement été installé le samedi 21 Août au cours d’une cérémonie présidée par le sous-préfet de l’arrondissement de Batcham. A cette occasion au foyer culturel Bambi, ledit comité s’est engagé par la voix de son Président M. Ngoufo Robert sur plusieurs chantiers de développement en faveur de Bambi répertoriés dans quatre grands secteurs de la vie active des populations de cette localité : la construction d’une ligne électrique triphasée, la création de nouvelles routes dans le secteur, le reprofilage régulier des routes, la transformation du foyer culturel Bambi en un immeuble.

Paul Lado, milite pour la pluralité des organisations

Vincent Gaspard Tatang trouve aussi que l’on aurait occulté la liberté d’association au nom d’un certain centralisme. Il pense qu’il est important de laisser prévaloir la liberté et la pluralité des intelligences communautaires à Batcham. Acteur de la société civile, Paul Lado, milite pour la pluralité des organisations. Et pense qu’en fonction de l’environnement local et de la conjoncture internationale tout doit être flexible. « Nous tenons à avoir des comités ou sous-comités légalisés non pas pour défier le grand comité du groupement Batcham, mais pour avoir une personnalité juridique et sécuriser les fonds de notre association dans un établissement bancaire. Se conformer à la loi de 1990 sur la liberté d’association est républicain », souligne Robert Ngoufo. Il dit qu’au niveau du sous-comité du village Bambi, tous les membres sont conscients que  la loi de décembre 1990 sur la liberté d’association dispose : «   Sous réserve des cas de nullité prévus à lʼarticle 4 ci-dessus, les associations se créent librement. Toutefois, elles nʼacquièrent de personnalité juridique que si elles ont fait lʼobjet dune déclaration accompagnée de deux exemplaires de leur statut.
L’article 7: (1) précise : « La déclaration prévue à lʼarticle précédent est faite par les fondateurs de lʼassociation à la préfecture du département où celle-ci a son siège. Un récépissé leur est délivré des que le dossier est complet si lʼassociation nʼest pas frappée de nullité. ». Plus fondamental est l’article 22 du pacte international sur les droits civils et politiques. Selon ce texte à portée internationale, «  Toute personne a le droit de s’associer librement avec d’autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d’y adhérer pour la protection de ses intérêts … L’exercice de ce droit ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l’ordre public, ou pour protéger la santé ou la moralité publiques ou les droits et les libertés d’autrui. Le présent article n’empêche pas de soumettre à des restrictions légales l’exercice de ce droit par les membres des forces armées et de la police. »

Guy Modeste DZUDIE(jade)