Mbanga et Loum. Les déplacés dénoncent les maigres salaires dans les champs

Mbanga et Loum. Les déplacés dénoncent les maigres salaires dans les champs

500 fcfa, ce serait le salaire perçu par jour par les déplacés anglophones qui ont trouvés la main d’œuvre dans les grandes plantations d’ananas et de plantain. Ils se sont plaints auprès des sous-préfets et attendent l’intervention de la commission nationale des droits de l’homme et des libertés.

La quarantaine passé, isidore ashu n’arrive plus à joindre les deux bouts. Parti de Buea où il a fui la guerre en laissant derrière lui sa maison brûlé et ses effets confisqués par les séparatistes anglophones, il a traversé à pirogue le fleuve Mungo pour se retrouver à Mbanga, faubourg situé à 10 km seulement de Buea dans la région du Sud-ouest,  et a 20 km de Douala dans la région du Littoral, département du Moungo.

« J’ai pris avec moi mes douze enfants et mes deux épouses pour me réfugier ici à Mbanga. Je suis un agriculteur depuis l’enfance. J’ai laissé plus de 10 hectares de terre  que je cultivais là-bas. J’ai trouvé la main d’œuvre dans une plantation d’ananas ici. C’est une très grande entreprise qui cultive l’ananas et exporte en Europe. Je leur apporte beaucoup de mon expérience, seulement je suis très mal payé » affirme Isidore.

Assis sur la véranda d’une case en brique de terre battue qui lui sert de lieu d’habitation, isidore Ashu en compagnie de ses proches déplacés anglophones reviennent d’une rencontre avec le sous-préfet de l’arrondissement de Mbanga denis albert Ngankam. Ils auraient au cours de la rencontre remis une lettre où ils dénoncent les abus des patrons locaux qui leurs payent des salaires de catéchistes pour travailler dans leurs vastes plantations.

« Je travaille dans une plantation de banane plantain qui s’étend sur plus de 100 hectares. Il y a une partie de la plantation à Loum, un village du département du Moungo, et une autre partie des champs ici à Mbanga. Malgré les navettes dans les deux plantations, le patron qui est un riche industriel me paye à peine 500 fcfa par jour. Nous avons beaucoup de volonté pour travailler, mais qu’ils augmentent nos revenus pour nous permettre de nourrir nos enfants » déplore un autre déplacé anglophone.

Les femmes et les enfants de 12 ans ou même moins de cet  âge sont aussi employés dans les champs. Les femmes travaillent dans les immenses champs de palmier à huile, de légumes ou de haricot vert qui s’étendent sur plus de 50 hectares. Les plantations situées dans les profondeurs du village. Ces femmes déplacés anglophones partent avec une voiture le lundi, et ne reviennent que le vendredi. C’est-à-dire qu’elles travaillent et dormes dans des campements là-bas.

« Ce travail m’éloigne de mon mari et de mes enfants. En un mois, je passe à peine 10 jours chez moi. Je n’arrive plus à suivre ma famille, et nous sommes très mal payées. » Confesse l’une des femmes. Les autres femmes se plaignent de la condition de vie des enfants qui sont employés dans ces champs.

« À 10 ans on doit être à l’école. La loi interdit le travail forcé des enfants à ces âges-là. Nous en sommes conscient mais qu’allons-nous faire ? Nous avons besoin d’argent pour vivre. Nos enfants sont aussi obligés de travailler » explique Enoh justice, femme déplacée, qui fond ensuite en larmes.

« victime d’une cabale » Le Département du Moungo est une zone agricole. Ses terres fertiles font courir les entrepreneurs européens et Camerounais qui dépensent des fortunes pour avoir des hectares de terres afin de faire de l’agriculture extensive. Riches et célèbres, la plus part des patrons vivent entre plusieurs pays. Surtout ceux qui font de l’exportation. Informés de la plainte des déplacés anglophones qui travaillent dans leurs plantations, le regroupement des entreprises productrices de palmier à huile (Unexpalm) dit être victime d’une cabale de dénigrement. Son secrétaire général Claude Mpouma explique qu’ils n’ont jamais offert de contrats de travail discriminatoires aux déplacés anglophones.

 « Ceux qui sont dans les champs sont des agents temporaires sans critères fixes de sélection. Généralement se sont des travaux qu’on, offre aux populations riveraines en respect des contrats d’exploitation avec l’Etat » se défend l’un des chefs d’entreprises. D’autres syndicats de regroupement des agriculteurs comme ceux de banane plantain et de palmier à huile ne cachent pas leurs satisfactions d’avouer que pour toute entreprise, « la main d’œuvre moins chère est toujours la bienvenue ».

Une pratique en violation de la loi L’article 10 du pacte économique, social et culturel ratifié par le Cameroun stipule que l’Etat a le devoir d’apporter « Une protection et une assistance aussi larges que possible à la famille, qui est l’élément naturel et fondamental de la société, en particulier pour sa formation et aussi longtemps qu’elle a la responsabilité de l’entretien et de l’éducation d’enfants à charge ». L’article 11 rajoute que «  Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence. Les Etats parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit et ils reconnaissent à cet effet l’importance essentielle d’une coopération internationale librement consentie ». Les autorités doivent donc prendre des mesures pour l’amélioration de la condition de vie des déplacés anglophones du Moungo.

Hugo Tatchuam (Jade)