La famille d’Ibrahima Bello mort suite à des tortures policières exige réparation

La famille d’Ibrahima Bello mort suite à des tortures policières exige réparation

Bavure.  Ibrahima Bello est décédé le 1er janvier 2022 dans l’arrondissement de Mbangassina. Ce jeune homme de 21 ans avait perdu ses deux jambes en 2017 après avoir été torturé dans les locaux du commissariat d’Ombessa. Sa mort ne devrait pas éteindre la procédure d’indemnisation pour sa famille.

Ibrahim Bello est mort aux premières heures du 1er janvier 2022 à Biakoua, une localité située dans l’arrondissement de Mbangassina, département du Mbam et Kim dans la région du Centre. Il avait vint et un ans. Il a été inhumé  quelques heures après son décès, conformément à la tradition musulmane.  Dans un communiqué de presse l’Ong Mandela Center international relève que ce jeune est mort des suites des complications liées à l’amputation de ses deux jambes il y a quatre ans.  Ibrahim Bello avait été sauvagement torturé en 2017 par les policiers dans les locaux du poste de police à Ombessa près de Bafia. Après avoir été victime d’atrocités, il avait été abandonné dans une brousse avant d’être retrouvé par des passants qui l’avaient conduit au Centre médical d’Ombessa avec les jambes « complètement charcutées ». Il  avait dû être amputé. Les images publiées sur les réseaux sociaux avaient suscité une indignation totale. 

Suite à ces traitements  inhumains et dégradants de la part des policiers, le jeune Ibrahim Bello avait été interné à l’hôpital Central de Yaoundé pendant plus de dix mois où il avait subi une opération chirurgicale. Après sa sortie de  l’hôpital, il avait été pris en charge au Centre national des Handicapés. Libéré, il était retourné dans sa famille et se déplaçait à l’aide d’une chaise roulante acquise  grâce à la contribution des âmes de bonne volonté.

Prise en charge non respectée

L’Ong Mandela Center international soutient que la prise en charge de la victime au Centre des Handicapés de Yaoundé reposait sur trois missions essentielles à savoir: une rééducation fonctionnelle en faveur de la victime, la dotation d’un appareillage ultramoderne pour faciliter ses déplacements, la prise en charge psychosociale et la reconversion socio-professionnelle afin de lui permettre de surmonter le choc. L’Ong Mandela Center international  qui agit également pour le compte de la famille du défunt relève que tous ces engagements pris par les responsables du Centre à travers un cahier des charges validé par le ministre des Affaires sociales n’ont  pas été respectés au moment de son « expulsion » du Centre national des handicapés.

D’autres responsables d’Ong de défense des droits de  l’homme sollicitent voir la famille bénéficier d’une indemnisation à la hauteur du préjudice subi. Etienne Tasse, le coordonnateur du projet dénommé Presse libre pour promouvoir les droits humains  (Plpdh) affirme : « Cela fait très mal d’apprendre qu’Ibrahim Bello est mort prématurément. Et que c’est à cause des tortures atroces que les forces de l’ordre lui avaient infligées. Paix à son âme ! Mes condoléances à sa famille. Celle-ci doit saisir les tribunaux pour demander que l‘Etat paye une indemnisation à la hauteur du préjudice subi. Si la famille n’est pas d’accord avec le montant de l’indemnisation arrêté par les tribunaux nationaux, il faut qu’elle saisisse l’Onu, qui généralement exige des Etats des montants de réparation très élevés »

Verdict contesté

 L’un des bourreaux avait été condamné par le tribunal à quatre ans d’emprisonnement ferme et un autre policier à trois ans de prison avec sursis. Un verdict qualifié par les associations de défense des droits de l’homme et des avocats du plaignant comme un verdict de la honte à l’encontre de ces agents de l’Etat qui sont sensés protéger les citoyens. Sans moyens financiers et faute d’une prise en charge adéquate de longue durée  par les services sociaux, le jeune Ibrahim Bello s’était réfugié non loin de Ngoro pour garantir sa survie. Le policier condamné par le tribunal de Bafia avait interjeté appel devant la Cour du centre. La famille d’Ibrahim Bello avait également fait appel car elle estimait que la somme de 50 millions de dommages et intérêts infligés à la Délégation générale à la Sureté nationale était insuffisante pour réparer le préjudice subi par la victime. Me Emmanuel Simh qui assurait la défense de la victime devant la Cour d’Appel affirme que la dernière audience a eu lieu le 14 décembre 2021. « Ce jeune homme vivait dans une misère déplorable. Il avait de la peine à assurer ses déplacements pour participer aux audiences.

Mort dans la misère

Après sa sortie du Centre national des Handicapés  à Yaoundé, il était obligé de rejoindre ses oncles au village parce qu’il n’arrivait pas à trouver facilement de quoi manger. Etant donné que ses oncles également n’ont pas assez de moyens financiers, le jeune homme n’a pas pu survivre aux atrocités subies depuis 2017. Il ne pouvait non plus se déplacer de la ville de Yaoundé pour assurer son suivi médical. Sa mort est liée aux complications de sa maladie », affirme l’avocat. Selon lui, l’article 18 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples a été violé. Cet article dispose : « Les personnes âgées ou handicapées ont également droit à des mesures spécifiques de protection en rapport de leurs besoins spécifiques ».

 La victime  est décédée sans obtenir réparation du préjudice subi conformément à la décision de justice rendue par le tribunal de première instance de Bafia en 2019. Pendant la procédure judiciaire au tribunal de première instance de Bafia. Cette décision rendue avait condamné la délégation générale à la Sûreté nationale à verser une somme de 50 millions comme dommages. Mais l’Appel fait par la Délégation générale à la Sûreté nationale a occasionné l’effet suspensif de cette décision de justice. Malgré le décès d’Ibrahima Bello, les avocats de la victime réclame justice. Une source à la Cour d’appel du Centre affirme que le décès d’Ibrahim Bello ne va pas interrompre l’action judiciaire ouverte dans cette juridiction suite à l’appel formulée par les deux parties. Au bout de cette action si l’une des parties n’est pas satisfaite, la Cour suprême tranchera en dernier ressort.

Prince Nguimbous (Jade)