Kamto encore sous la menace d’une assignation à résidence

Kamto encore sous la menace d’une assignation à résidence

Atteinte aux droits de l’homme. De nombreux policiers ont été aperçus, le 6 décembre 2021, devant le domicile de Maurice Kamto, l’opposant, sorti deuxième lors de la dernière élection présidentielle. L’année dernière, il avait été mis «en résidence surveillée », sans aucun acte juridique.

La rue qui mène au domicile de Maurice Kamto, le président national du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc), au quartier Santa Barbara dans l’arrondissement de Yaoundé 1er était calme ce 6 décembre 2021 aux environs de 13h. Mais la peur était visible chez quelques voisins qui ont aperçu un grand déploiement sécuritaire au domicile de Maurice Kamto entre 12h et 13h30 :« J’ai vu une forte mobilisation des policiers à l’entrée du domicile de l’opposant politique qui conteste depuis 2018  les résultats des élections présidentielles et dénonce la fraude électorale. Je ne sais pas ce que ces policiers sont allés faire là-bas », explique un habitant du quartier. Les informations recueillies dans ce quartier font état de la présence en ce lieu de plus de dix véhicules de la police.

Me Hyppolite Meli, l’avocat du président du Mrc qui s’est rendu hier au domicile de son client, affirme : « J’ai été informé ce 6 décembre de la présence de nombreux policiers au domicile du président national du Mrc. Je me suis rendu sur les lieux pour savoir de quoi il s’agissait exactement. Une fois sur place, j’ai vu que les policiers étaient en train de repartir. Cette équipe était conduite par le chef de la Division régionale de la police judiciaire du Centre. Ces policiers sont arrivés au domicile de Kamto pour chercher à le rencontrer en expliquant qu’ils étaient porteurs d’un message du délégué général à la Sûreté nationale. Le président du Mrc a envoyé la nouvelle au vigile de dire à ces policiers de laisser ce courrier à la guérite. Mais ils ont précisé qu’ils étaient porteurs d’un message verbal. Samedi 4 décembre 2021, ces policiers étaient déjà là pour chercher à rencontrer Maurice Kamto pour lui dire la même chose. »  

L’avocat de Maurice Kamto parle d’une intimidation, estimant que les autorités policières  une nouvelle fois assignent son client en résidence surveillée avant et pendant la Coupe d’Afrique des nations de football prévue au Cameroun dès janvier 2022. Il dénonce la violation de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui stipule : « Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. »

La dédicace qui fait peur

Le déploiement sécuritaire observé le 6 décembre devant le domicile de Maurice Kamto est intervenu cinq jours après sa séquestration par les policiers et gendarmes dans un hôtel de Douala. Du 1er au 2 décembre 2021, le président du Mrc a séjourné dans la capitale économique, où il devait participer  à la dédicace d’un ouvrage. Le dispositif sécuritaire déployé devant son hôtel l’a empêché de prendre part à cette cérémonie.

Après son séjour à Douala,  Maurice Kamto a organisé, le 3 décembre à Yaoundé une conférence de presse au cours de laquelle il a invité les autorités judiciaires à libérer tous les prisonniers politiques afin qu’ils passent les fêtes de fin d’année en famille. Face au traitement qui lui a été infligé à Douala par les forces de l’ordre, Maurice Kamto a affirmé : « Que ceux qui aiment salir l’image du Cameroun et l’impute à d’autres, la saliront encore à l’occasion de la Coupe d’Afrique des nations prévue au Cameroun en janvier 2022 ». L’avocat de Maurice Kamto soupçonne que le déploiement des forces de défense devant le domicile de Kamto vise à l’empêcher de manifester pendant la période de la Coupe d’Afrique des Nations de football. De septembre jusqu’en décembre 2020 à l’occasion des élections régionales, le président du Mrc avait été placé en résidence surveillée à son domicile sans une décision de justice. Cette mesure prise par les autorités avait pour but de l’empêcher de boycotter les élections régionales du 6 décembre 2020.

Le gouvernement menace

A l’occasion de la conférence semestrielle des gouverneurs des dix régions, le 9 décembre 2021, Paul Atanga Nji, le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, a fait cette mise en garde à Maurice Kamto : « Le gouvernement est   prêt à faire la bagarre au cas où Maurice Kamto tente de perturber la coupe d’Afrique des nations de football prévue au Cameroun dès janvier prochain. »

Jean Marc Bikoko, président de la Coalition « Tournons la page », une organisation de la société civile qui milite pour la transition pacifique au Cameroun, estime que les restrictions policières et administratives non écrites dont  Maurice Kamto fait l’objet visent à restreindre l’espace des libertés publiques. « Au lieu de mettre en place un dispositif de répression, les autorités gagneraient à mettre en place un code électoral consensuel capable de nous amener vers une transition pacifique », affirme Jean Marc Bikoko.

Prince Nguimbous (Jade)