Insuffisance de matériel de dépistage covid 19

Insuffisance de matériel de dépistage covid 19

Des centaines de voyageurs bloqués au Cameroun à la veille de la Can

Une centaine de voyageurs en attente de leurs résultats de covid 19 pour prendre leurs vols ont envahi le service de virologie de l’hôpital Laquintinie, qui est l’unique centre agréé d’analyse des échantillons en provenance des différents centres de prélèvements de la ville. Une violation du droit d’accès au service de santé qui inquiète à la veille de la Coupe d’Afrique des Nations, car les spectateurs seront obligés de se vacciner, et les délégations obligées de se faire dépister.

Hôpital Laquintinie de Douala, vendredi 31 décembre 2021, 09h. Le major de service de neurologie est harcelé dans son bureau par un groupe de personnes très en colère, venues demander les résultats de leur dépistage de covid 19 effectués depuis plusieurs jours, dans les centres de diagnostic et de contrôle du covid 19 (cdcc) de Douala.

« Je me suis fait dépister au centre de santé de Logbaba, qui est un point de prélèvement. Là-bas, ils m’ont dit que mon résultat affiche négatif, mais que je dois venir ici à l’hôpital Laquintinie pour chercher le document qui me permettra de voyager. Cela fait plus de quatre jours que je me suis fait dépisté, je n’ai aucun résultat. A l’aéroport, onexige des tests pcr qui datent de moins de deux jours. Je suis confuse », affirme Sylvie Onono, une jeune dame qui habite au Canada, venue au Cameroun pour passer les fêtes de fin d’année en famille. 

Sintcha Célestine est très en colère. Elle  indique qu’elle a déjà raté son vol  à trois reprises à cause de l’absence de résultat de dépistage. « On m’a fait le prélèvement à l’hôpital de district de la Cité des Palmiers. La première fois, ils m’ont dit que mon résultat n’est pas sorti. J’ai refait le dépistage pour une deuxième fois. Là, ils m’ont demandé d’aller moi-même au centre de traitement des données pour voir ce qui se passe. Je me suis rendue ici. On m’a dit qu’il y a eu échec dans la machine. Me voici à nouveau, je n’ai toujours pas de résultat. Moi je vis aux Etats-Unis, j’avais des marchandises en cosmétique à expédier au Cameroun pour ces fêtes de fin d’année. Je n’ai pas pu le faire », regrette-t-elle.    

A l’hôpital de Bonamikano, un centre de prélèvement situé dans le quatrième arrondissement de Douala, des cas d’irrégularités ont aussi été signalés. Le 30 décembre, un couple qui voulait regagner la Belgique après quelques jours passés au Cameroun s’est rendu dans cet hôpital, mais tout ne s’est pas passé normalement.

« Lorsque nous nous sommes inscrits sur le site internet du ministère de la santé publique, ils nous ont donné un matricule et ont demandé qu’on se rende dans cet hôpital qui dépend du centre de district de Bonassama. Arrivé ici à 9h, la directrice a refusé de nous recevoir sans aucune raison. Nous, et les huit autres personnes que nous avons retrouvées là-bas, nous n’avons pas été reçus.  La directrice du centre de prélèvement s’est levée et est partie sans rien dire. Nous sommes surpris de ce mépris dans un service public de santé. Notre vol était programmé le lendemain. Tout a été annulé. Et maintenant c’est à nous de chercher un autre centre pour nous faire prélever, et attendre d’avoir les résultats », explique le couple. 

Désarroi des personnes testées positives

« On vient de me remettre mes résultats. Ils disent que je suis positif au covid19. Incroyable. Je voulais prendre le vol ce soir ». visiblement abattu, Thomas, jeune commerçant âgé d’une quarantaine d’années avec son sac en bandoulière, est resté de nombreuses minutes au téléphone avec sa famille demeurée en France. Testé positif au covid 19 au centre de l’hôpital Laquintinie, , il est surpris qu’aucun service de prise en charge ne vienne à son secours. « Ils m’ont uniquement remis mon résultat. Ils ne m’ont donné aucunes instructions pour un éventuel confinement, ils ne m’ont pas conduit dans un centre de prise en charge. On te remet juste ton résultat et le reste on s’en fout », explique-t-il.  Bref, aucune mesure de prise en charge. Pourtant, cet hôpital est le seul centre agréé par l’Etat.

De nombreuses autres personnes malades ou présentant des symptômes de covid se sont ruées vers les neuf centres de dépistages de la ville de Douala pour se faire tester en vue d’une prise en charge. Ils ont été surpris lorsqu’ils ont constaté qu’aucun dispositif n’est mis en place par l’Etat.

Silence des dirigeants

Le Directeur de l’hôpital Laquintinie, Noel Emmanuel Essomba, a indiqué que le matériel d’analyse des données ne leur permet pas de satisfaire tout le monde à la fois. « Nous sommes obligés de demander parfois, lorsque nous sommes débordés, aux unités de prélèvement d’arrêter de collecter les données, c’est-à-dire de recevoir les patients.  Autre chose aussi, lorsque la machine nous donne des résultats douteux, nous sommes obligés de recommencer le dépistage. Il faut tenir compte de tous ces paramètres. Mais le gros problème, c’est que nous avons un nombre insuffisant de matériel », indique-t-il.

De son coté, le délégué régional de la santé publique du Littoral, le docteur Mambo Mako Albert, n’a pas souhaité s’exprimer sur cette polémique. Pour lui, les services se contentent de mettre en application les décisions de l’Etat. En cette veille de la coupe d’Afrique des Nations, les inquiétudes fusent de toutes parts, puisque des millions de personnes sont attendues. Les spectateurs devront être vaccinés, et toutes les délégations devront être testées avant de quitter le pays.

Violation du droit d’accès au service de santé

L’article 16 de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples indique que « toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé. Et les Etats  parties à la charte doivent prendre des mesures nécessaires pour protéger la santé de leurs populations et leur assurer une assistance médicale en cas de maladie ».  Avec les millions de personnes attendues,  le Cameroun devrait améliorer son système de dépistage et prise en charge du covid 19 pour protéger la santé de sa population.

Hugo Tatchuam (Jade)