Indépendance et pluralisme médiatique. A l’Ouest, le Mrc accuse la télé publique de partialité

Indépendance et pluralisme médiatique. A l’Ouest, le Mrc accuse la télé publique de partialité

La question de l’indépendance, de la diversité et du pluralisme médiatique rejaillit. Surtout qu’au Cameroun, les lois sur la communication sociale et l’audio-visuel n’ont pas toujours été réformées conformément aux orientations de la déclaration des Principes de l’Union africaine sur la liberté d’expression et l’accès à l’information.

Le lundi 05 septembre dernier, Me André Marie Tassa, secrétaire de la Fédération régionale du  Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (Mrc) à l’Ouest, était attendu pour l’enregistrement d’une émission politique à diffuser dans le cadre de la délocalisation du plateau de la Crtv (Office de diffusion des radios et télévisions du Cameroun) dans la région de l’Ouest et portant sur les raisons qui font courir les partis politiques dans cette partie du pays. Reste que le patron du parti du Pr Maurice Kamto dans la région de l’Ouest n’a finalement pas honoré ce rendez-vous médiatique sur les ondes de la chaîne à capitaux publics.

Cette  absence a créé une gêne chez René Njoa Mot, journaliste principal diplômé de l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic) et chef de la station régionale de la Crtv à l’Ouest. «J’ai multiplié les démarches à l’endroit du responsable régional du Mrc à l’Ouest afin qu’il prenne part à cette émission. Il a initialement donné son accord de principe. Mais, en dernière minute, il a déclaré son indisponibilité », accuse le journaliste qui souligne ne pas être dans une logique « d’ostracisme » à l’endroit de cette formation politique de l’opposition extraparlementaire. Tout comme vis à vis d’autres partis politiques hostiles au gouvernement et  représentés à l’Assemblée nationale.

Il s’agit notamment du Front social démocrate (Sdf en anglais), de l’Union démocratique du Cameroun (Udc), de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) et le Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale (Pcrn). Quant au parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais Rdpc),  René Njoya Mot affirme que les choses ne sont pas toujours comme l’imagine une certaine opinion. « Dans le cadre du plateau organisé ici récemment, nous avons insisté au niveau du secrétariat national à la communication du Rdpc afin qu’un émissaire soit mandaté pour parler au nom de ce parti sur la Crtv », précise-t-il.

Objectivité à géométrie variable

Cette affirmation d’indépendance ou de respect du principe de la pluralité et de la diversité médiatique par la Crtv telle qu’édictée par l’Union africaine dans sa déclaration des principes (points 11, 12 et 13) sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique   peut-elle convaincre les dirigeants du Mrc à l’Ouest ? Roger Dafem, secrétaire délégué chargé de l’inspection et de l’évaluation à la fédération régionale du MRC à l’Ouest, estime que la Crtv est loin d’être objective à l’endroit des partis de l’opposition.

Pour lui, l’Office de radio diffusion du Cameroun a refusé de couvrir le meeting de  cette formation politique de l’opposition tenu à Bafoussam le samedi 20 août dernier. » Je suis arrivé à la Crtv pour remettre la demande de couverture médiatique, personne n’a voulu prendre ma correspondance. Les employés et journalistes présents m’ont demandé de contacter directement le chef du service de l’information. Ce que j’ai fait. Il m’a demandé de lui envoyer l’invitation par watshap. Ce qui a été fait », explique-t-il. Reste que le jour du meeting, fait savoir Me André Marie Tassa, aucune équipe de reporters de la Crtv ne s’est manifestée pour la couverture du meeting,   contrairement aux équipes déployées par Equinoxe radio et les télévisons Dash Tv, Prime Time Tv, le journal Le Messager et autres médias à capitaux privés. Conséquence : aucune actualité de cette réunion publique n’a été diffusée lors des journaux parlés et télévisés de la chaîne publique.

Tout comme aucune actualité liée à l’organisation des élections internes au MRC du 23 au 31 juillet 2022 dans 33 des 40 communes de la région de l’ouest n’a été couverte par la Crtv. Alors que cette chaîne, dénonce-t-on au MRC, a réservé le 03 août 2022, un traitement optimal à la conférence de presse d’une dizaine de militants dissidents du MRC conduits par Emmanuel Kueka.  Cameroon Tribune, quotidien bilingue à capital public, a aussi brillé par son absence lors de ce meeting.

Partiale et partisane, tels sont les qualificatifs qu’ils n’hésitent pas à attribuer à cette couverture pour dénoncer un parti pris flagrant en faveur du pouvoir Rdpc. « Une partialité » qui pour le MRC a été également manifeste lors de la campagne de l’élection présidentielle de 2018. Les activités post-électorales, notamment les marches de contestation suivie des interpellations et de l’embastillement du leader du MRC, le Pr Maurice Kamto, et de ses partisans, n’ont jamais été couvertes par la Crtv. Coordonnateur national du Regroupement des médias citoyens, Gustave Flaubert Nkengne accuse  lui aussi « la proximité entretenue entre la Crtv et les acteurs politiques proches ou pro-gouvernementaux.»

Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions

A contrario, René Njoya Mot réaffirme que le média public  réserve, conformément à sa ligne éditoriale, un traitement professionnel et impartial à toutes les activités politiques qui se déroulent dans la région de l’Ouest. « La Crtv Ouest n’a jamais reçu de demande de couverture médiatique du Mrc à l’Ouest. Quand nous recevons une sollicitation de couverture d’une organisation, nous envoyons une équipe sur le terrain des événements. Après la collecte, nous envoyons nos papiers à Yaoundé pour diffusion », explique-t-il.

Reste que de nombreux militants du Mrc – qui font partie des téléspectateurs et des contribuables qui versent des droits audiovisuels en payant leur impôt – pensent que leur droit à l’information a été violé par la Crtv.  Alors que l’article 9 de La Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples prescrit : « 

1- Toute personne a droit à l’information.

2- Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements. »

Et que faire quand les lois et règlements n’ont pas été réformés par le législateur camerounais pour être globalement perçus par des citoyens comme des instruments de promotion de la liberté d’expression et de l’accès à l’information à travers l’indépendance et la diversité des médias ?

Guy Modeste DZUDIE(Jade)