Décès de Divine Ngwa.Les révélations de l’autopsie très attendues

Décès de Divine Ngwa.Les révélations de l’autopsie très attendues

L’affaire connaît une nouvelle évolution. Le Secrétariat d’Etat à la défense (SED) a initié une enquête interne afin de faire la lumière, selon les dernières informations.

L’autopsie du corps de Divine Ngwa Chemuanguh a été pratiquée le 12 novembre 2020 par les services de l’hôpital central de Yaoundé (HCY). Les résultats seront bientôt disponibles, explique Grâce Chemuanguh, la sœur aînée du défunt. En fait, la famille veut voir clair dans le décès de leur enfant consécutivement à son interpellation dans la nuit du 28 au 29 octobre 2020 par des éléments de la gendarmerie, qui l’ont conduit dans les locaux du secrétariat d’Etat à la défense chargé de la gendarmerie (SED) sans bon de garde à vue. Il meurt le 1er novembre après plusieurs traumatismes suivant le certificat de décès remis par l’infirmerie du SED à la famille.

En attendant d’avoir plus de détails, il faut indiquer que dans cette procédure, des murs ont déjà commencé à se dresser. Selon la famille, des individus se sont introduits dans la salle où a été l’autopsie le 12 novembre. Ils ont voulu l’interrompre sans aucun titre, apprend-on. Ces personnes sont allées jusqu’à expulser les responsables de la famille avant d’être, eux-mêmes, éjectés des lieux sans autre forme de procès, selon un témoin. C’est à cause de ce défaut de document que le personnel de l’hôpital a agi ainsi, a-t-il été dit. Le motif évoqué ici est que le corps appartient à la famille qui a pris l’initiative de chercher la vérité, et c’est à elle seule que des comptes doivent être rendus, explique un personnel médical.

Le 13 novembre, une autre information reçue au sein de la formation hospitalière fait état de ce que le directeur de l’hôpital central de Yaoundé a saisi la morgue afin que le corps soit placé sous scellés. « C’est en exécution d’une réquisition » du Commissaire du gouvernement près le tribunal militaire de Yaoundé, a-t-il été dit. Rendu à la morgue, on apprend effectivement que le corps est sous scellés. Une nouvelle autopsie pourrait même être pratiquée, d’après les informations recueillies sur les lieux. Approchés, les responsables de la morgue se sont montrés peu diserts ; ils se sont refusés à toute déclaration. Au secrétariat et au service du courrier du directeur général de l’hôpital central de Yaoundé où s’est rendu le reporter d’Emergence, aucune trace physique dudit document relatif à une éventuelle notification pour la position des scellés n’a été trouvée. Il a été impossible de rencontrer le patron des lieux. « Il faut passer lundi », dixit l’équipe en fonction. La famille également, surprise par cette information, s’est rendue à l’hôpital s’assurer de la véracité des faits. Elle affirme qu’elle n’a reçu aucune notification. Grâce Chemuanguh et les siens ignorent encore tout sur les véritables mobiles et sur l’identité des responsables du scellé au moment où nous mettons sous presse. Sauf que la réalité est là, le corps du défunt est bel et bien interdit d’accès depuis le 13 novembre dernier.

Mort entre les mains des gendarmes

Pleurs et consternation ont en effet élu domicile dans la famille de Divine Mbgwa depuis le 1er novembre 2020, date à laquelle la famille apprend le décès de leur jeune frère âgé de 35 ans dans les locaux du secrétariat d’Etat à la défense (SED) dans des conditions non encore élucidées. Tel qu’indiqué, par la famille et les voisins, c’est à 2H30 du matin, dans la nuit du mercredi 28 au jeudi 29 octobre 2020, qu’une dizaine de gendarmes débarque à leur domicile au quartier Obili. Alors que sa copine revient de son activité commerciale, à peine a-t-elle ouvert la porte que les gendarmes font irruption et se saisissent de Divine, le menottent et le sortent violemment de la chambre. Brutalisé, Divine sera ensuite molesté devant la famille et les riverains, a expliqué sa sœur aînée au reporter d’Emergence. Elle affirme qu’il a reçu une pierre sur la tête et une autre sur ses parties génitales. Du sang a jailli des oreilles et sur la tête, soutient-elle.

Conduit manu militari, avec sa copine, dans les locaux de la gendarmerie, Divine sera ramené seul chez lui aux environs de 5 heures du matin, d’après la famille. Elle explique en outre que son frère est maintenu dans le véhicule des gendarmes pendant que l’un d’eux se rend seul dans le poulailler tenu par l’homme interpellé situé à l’arrière du domicile. Il a été interdit à quiconque de l’accompagner, dit-elle. Quelques instants après, le gendarme est revenu avec un paquet. Sans l’ouvrir, il déclare que c’est l’arme recherchée. Aussitôt, le cortège s’ébranle à nouveau vers le SED avec le malheureux.

Dans la journée du vendredi 30 octobre, la famille se rend au SED avec de quoi manger. Elle sera refoulée. Le même scénario va se reproduire le samedi suivant. Elle est incapable de savoir ce qui se passe réellement ; les éléments de la gendarmerie quant à eux rassurent ; ils affirment que Divine a mangé et qu’il va bien, dixit Grâce Chemuanguh. C’est le dimanche 1er novembre qu’elle reçoit un coup de fil depuis le SED, comme quoi, son frère veut les voir. Heureux de cette nouvelle, plusieurs se déportent sur les lieux. Conduite à l’infirmerie, la famille se retrouve face au corps inanimé de Divine. Elle est informée de ce que le défunt vient de rendre l’âme. Ce que la famille conteste.

Sommés à l’instant de partir avec le corps, les proches du défunt se rendent finalement à la morgue du CHU pour conservation. Un certificat de genre de mort leur est exigé. Entre temps, le corps est déshabillé. Ceux qui sont restés au CHU, découvrent des traces de violence. Les autres sont retournés au SED où il leur est remis un certificat de genre de mort sans numéro d’enregistrement après une longue attente, raconte la famille. Le document auquel Emergence a eu accès fait état de « multiples plaies d’origine traumatique ». Finalement, le corps est déposé à l’hôpital central de Yaoundé ; il est ensuite examiné. Le médecin fait le constat suivant : « mydriase bilatérale aération ; silence auscultatoire cardiaque ; ecchymose en lunette bilatérale ; plaies superficielles au dos grands axes 20 cm ; dermabioses multiples ». Pour voir clair dans ce dossier, le professionnel de santé prescrit une autopsie.

A la quête de la vérité

Après cette étape, le corps est retourné au CHU où il a passé dix jours. C’est le 11 novembre qu’il est transféré à l’hôpital central de Yaoundé. L’autopsie est faite le lendemain, 12 novembre. C’est également dans cette formation hospitalière que se trouve le corps.

Dans la foulée des événements, joint au téléphone par un confrère sur le lieu du deuil, la tête de fil des gendarmes refuse d’abord de s’exprimer. Par la suite, il demande de se rapprocher du Service central des recherches judiciaires du SED. L’affaire fait par ailleurs des émules. On apprend justement depuis l’hôpital que le Secrétaire d’Etat à la défense chargé de la gendarmerie (SED) en personne, a déjà instruit une enquête interne afin de faire la lumière sur cette affaire et que les responsables soient sanctionnés ; encore que le nommé Divine Ngwa Chemuanguh (35 ans) est mort à la suite de multiples traumatismes corporels tel qu’indiqué dans un acte établi, cette fois, par les services même du SED et auquel nous avons eu accès.

Pour avoir la version des faits de la gendarmerie, une correspondance pour complément d’informations a été adressée au Secrétaire d’Etat chargé de la gendarmerie. A ce jour, aucune réponse n’a encore été reçue. La famille quant à elle continue de réclamer justice pour feu Divine Ngwa qui laisse un enfant de 12 ans.

Au rang des précisions à faire, un riverain témoigne et affirme que le défunt a passé quatre ans en prison pour port d’arme. « Il avait purgé sa peine et il avait décidé de changer », soutient l’homme.

Les heures qui viennent s’avèrent cruciales : les résultats de l’autopsie seront disponibles et le SED verra clair dans ce qui s’est réellement passé. Hervé Ndombong, avec Jade